Forum Grand Corps Malade et slam

D’après la rumeur, mais peut on croire la rumeur,
Il se murmure que nous les seniors, n’avons plus peur !
Débarrassés de notre armure, enfin libres de dire,
Sans méchanceté aucune, que nous avons vécu le pire !

Que de notre temps, mais il n’y a pas si longtemps
La vie était plus dure, par manque, sois disant, d’argent.
Mais l’argent pourtant s’amassait, mieux proliférait !
Certains se sont gavés, d’autres ont sombré dans ce merdier !

Voilà donc le débat relancé, entre l’avant et l’après !
Si avant, la vie avait le goût de l’aventure, ou si après
Il ne reste plus de semelles à nos paires de chaussures,
Ou si, « avant » l’insouciance offre à « après » sa période de censure !

Il n’y a pas si longtemps, on jouait dans la rue !
Pas de délaissé, pas de rejeté ni d’intrus !
Pas de vraies jalousies, seulement quelques envies,
Des rivalités oubliées, vivre la vie !

Des jeux d’imagination, pour faire chier les vieux !
Des rêves de passions, raison pour oublier Dieu !
Des guerres passées, combat de soldats oubliés,
Cow-boy, Indiens, chevaliers, tout y est passé !

Ne plus savoir qui étaient les bons, les méchants !
Le petit écran était encore noir et blanc !
Nous, on avait raison, couleur n’a pas de saison !
La guerre des boutons était notre blason !

Les jeunes nous ont fait un copier collé, version
« La veille génération, sûr vous en avez chié,
Mais les interdits  n’avaient pas encore tout monopolisé !
De votre temps le Sida était Soda, sans la modération. »

Le plein emploi évitait la galère dans les chaumières.
Ville ou campagne prospéraient à un rythme plutôt pépère.
L’avenir ignorait le mot crise, occultait le chômage,
N’avait pas conscience de l’âge, ni même d’être un mirage.

Pour le fun et notre réputation, insistons sur notre calvaire !
Bien leur ancrer dans le teston, comment on a morflé sévère,
Qu’à notre époque, les coups étaient au catalogue maison,
Qu’on est des rescapés des faits pervers sans sommations.

Si on voulait du blé, fallait aller glaner,
Ramassage de patates à la place de glander !
Mercredi, samedi, pas vraiment jour de fête,
Pas d’ordi ou de casque vissé sur la tête !

On restait branché sur le monde des vivants !
On voulait changer la ronde des morts-vivants,
Penser, cogiter pour trouver des solutions !
Rêver, s’agiter pour ne pas l’avoir dans le fion !

On voulait plus être des militaires potentiels,
Des petits bourgeois se croyant encore au ciel !
On a vu naître une nouvelle génération,
Petits bras, militants pour la désolation !

Bon l’ami je crois que l’on a fait carton plein,
Comme à la fête foraine de notre enfance.
Tu te rappelles, pour nous, cette journée c’était Byzance !
Mais le top, le train fantôme pour s’exciter sur les seins !

Putain ce bol d’air qu’on vient de prendre, d’avant !
Je sais ça fait un peu rétro, mais l’évoquer quel pied !
La jeunesse c’est sacré, tu crois qu’elle s’est envolée,
Et avec elle, tout un passé. Tu crois que c’était mieux avant ?

C’était le temps de la jeunesse qui fout le camp !
Moment d’ivresses, des rêves qui ne durent qu’un temps !
Rébellions et révoltes, l’innocence aux mains pleines,
Attitudes désinvoltes, quitte à faire de la peine !

Moins de misères, pourtant moins de lueurs d’espoir !
Un peu plus d’air, des connaissances dérisoires !
Plus d’avenir qui chante, une errance sans grand soir !
Des surprises en attente, j’y pense, je veux y croire !