Forum Grand Corps Malade et slam

AU FIL DU TEMPS.

Je me suis assis ce matin sur un banc du parc.
Une vieille femme est passée avec un vieux sac,
Elle marchait lentement comme si elle était le temps.
Comme si elle charrié ses quatre-vingts ans.
Je me suis demandé d’où elle venait, si elle était belle avant.
Je me suis assis ce matin sur un banc et j’écoutais le vent.

J’avais envie d’un café bien chaud, d’un sourire en rentrant.
Le café était bon et le croissant frais, mais à trente ans,
Je n’ai que le goût amer de l’absence et la chaleur de ma solitude.
On devrait lui donner le nom d’une veste pour temps rude.
Je marche en rond, en petit rond, dans mon petit appartement
Je marche lentement comme si j’avais tout ce temps.

Nos mains sont parfois pleines de bonnes choses, qu’on vole, qu’on cueille.
Mais il arrive que tous ces beaux instants attendent sur le seuil.
Qu’il vaille se lever avec l’envie plus forte de vivre que de mourir
Et tenir la barre dans le tumulte, pour l’entendre sourire.
J’ai rêvé d’une femme et de son soupir, j’essayais de lui dire :

« Regarde, les plumes qui s’évadent de l’étreinte de la lave
Gravis cent fois la montagne devant et appelle ton cheval : Courage.
Donne-toi le temps de la sagesse pour entendre gronder la rage.
L’humanité est sous l’aube unique d’un ciel pur et sauvage.
Écoute le peuple. Écoute le Peuple qui chante la vie aux nuages,
Car nul ne te dira mieux le soir qui fut et la chute de tous les âges. »

Un sac flotte dans le vent, la ville, près de l’Istanbul, dans le soir se pose,
Roule, redécolle, et mes rêves dedans s’envole,
Coincé dans le Maintenant, je reste
Scotché à l’arrêt à l’attendre la blonde vie,
Je campe, loin, contre le mur du matin au soir.
Je me souviens de nous cramponnés aux jeux du square
Les gosses courent, taclent, grattent l’azur avec des cris
Il faut le dire, aussi, les rires changent le triste sur gris
En gros Splash de vie dans le tragique de la banalité.
Je siffle une Adelscott sur la terrasse, sous soleil d’été.